Débat en médiathèque. Les chiffres baissent, la fréquentation flageole, les médias s’évanouissent dans la dématérialisation, vont-ils emporter le prêt public dans le gouffre de l’hypermatérialisation et laisser triompher l’analphabétisation des industries culturelles !!!? Il y a de quoi, en constatant les flux de curiosités fléchir dans les espaces culturels de prêt, avoir le moral en berne. Et puis, voici des responsables de médiathèque qui organisent une rencontre avec des « usagers ». Pour dialoguer. Exposer avec le moins de langue de bois possible la situation de la Médiathèque, ses difficultés, leur contexte, les pistes de travail, les ambitions, l’espoir à moyen et long terme d’une mutation réussie. Mutation qui n’ira pas sans, aussi, déplaire aux habitudes de pas mal d’usagers. Parce que, durant un temps, la Médiathèque à l’ancienne va continuer, et continue à rencontrer les attentes de beaucoup d’habitués qui poursuivent leur mode de consommation culturelle comme avant, tout en allant vers d’autres propositions, un autre esprit, un autre modèle d’économie financière et spirituelle qui ne reposera plus sur la circulation de médias physiques… Et voilà que l’on se retrouve devant 13 personnes, de profils divers, âges et centres d’intérêts, mais toutes attentives. Toutes soucieuses de l’avenir de cette association de prêt public qu’ils fréquentent, pour certains, depuis 40 ou 30 ans, ou depuis seulement quelques années. Mais pour toutes les personnes présentes, il se joue là, dans l’avenir de La médiathèque quelque chose de très important, qui importe pour elles, à titre individuel, certes, mais aussi et surtout qui importe dans l’image qu’elles se font d’un futur positif et constructif de la société, du vivre ensemble. La qualité de cette attention, qui émerge de façon beaucoup plus forte, de sourdre ainsi d’un rassemblement éphémère de personnes qui ne se connaissent pas au départ, mais qui se rassemblent bien dans ce souci partagé d’un devenir culturel de qualité, cette qualité est ni plus ni moins galvanisante !! Un des participants, du reste, rappellera que l’atout des médiathèques doit être et rester le contact humain, soit l’échange direct, immédiat, humain, de savoir faire culturel, d’informations, de conseils. Oui, ça doit rester la base, pour laquelle il faut argumenter encore et toujours, il faut insister, pour qu’en éclate l’évidence auprès du politique et des personnes responsables du développement des infrastructures culturelles dans la cité. Le contact humain a été la base du succès de la médiathèque et, pour le dire, vite, ça s’est un peu dilué dans l’ampleur de ce succès. Il faut recapitaliser sur cette valeur, sur le terrain bien sûr, mais néanmoins avec de nouvelles pratiques à inventer, mais aussi en tirant le meilleur parti des outils communautaires d’Internet. (Des réalisations sont déjà en cours, la création de blogs de« médiathècaires , mais aussi un outil de communautarisation des membres de la Médiathèque un lieu de rencontres virtuel et de mise en partage de leurs passions, soit Mediavores que la plupart des usagers impliqués, présents ce vendredi, ne connaissaient pas !) Diversité des questions, un même souci. Et donc, il y avait là, l’usager hyper familier, qui semble connaître la médiathèque de l’intérieur aussi bien que nous et qui nous stimule à trouver le bon équilibre entre « découverte » et « média demandés ». Il y a des questions très précises sur la politique d’achat : pourquoi autant d’exemplaires de certains tubes et d’autres peu représentés ou difficiles à trouver. Ce qui permet de clarifier nos mécanismes de choix, les outils par lesquels nous exerçons notre politique d’achat. Il y a une demande de complément d’informations sur le plan social et l’avenir de certains centres bruxellois transférés ou fermés. Là aussi, on sent l’intérêt dans le bon sens du terme pour l’avenir de l’association, ce sérieux « de petits actionnaires » qui veulent savoir où l’on va. Et c’est un plaisir, sans média interposé, de pouvoir s’expliquer sur cette politique. Il y a l’institutrice soucieuse de voir la Médiathèque se connecter au milieu scolaire. L’occasion de présenter les projets de notre récent service éducatif, exposer le dossier déposé à la commission Culture et Enseignement. Il y a le fan d’Elvis Presley qui explique que notre discographie de Presley est pleine de scorie mais qu’il nous manque une série d’originaux : magnifique occasion de rappeler que la médiathèque ne peut rebondir qu’en captant l’implication des cercles d’amateurs, en fédérant le savoir-faire des amateurs qui peuvent donner ne nouvelle vie à une Médiathèque. Celle-ci pouvant, en retour, amplifier l’influence constructive de ces cercles d’amateurs sur les pratiques culturelles dans la société. En clair, eh bien, ce monsieur peut nous aider à parfaire notre discographie d’Elvis Presley. Avis à d’autres amateurs ! Bien entendu, la question tarifaire qui a été soulevée, avec des positions contrastées, même les plus jeunes ne considérant pas forcément que nos prix soient trop élevés. Mais nous réfléchissons à une autre logique de tarifs, nouveau modèle économique oblige. Il y a l’usager soucieux de trouver des documents audiovisuels peu disponibles dans le commerce et qui semble ne pas toujours trouver son bonheur. Ce sera l’occasion de lui donner des pistes, de lui présenter des outils de recherche dont il n’avait peut-être pas encore la maîtrise… Il y a l’étudiant en musicologie qui souhaiterait bien travailler chez nous, soit y faire un stage, et qui s’interroge d’autre part sur notre offre de téléchargement, sur notre interface informatique peu concurrentielle avec le genre Itunes… Il aura reçu de bonnes nouvelles puisque qu’il aurait des chances de réaliser un stage chez nous et qu’il aura appris que nous travaillons bien à l’amélioration de la navigation sur notre site incluant de nouveaux services offerts par notre base de données. Mais, il faut bien comprendre que la masse d’informations que nous devons rendre fluide sur notre site est plus importante et plus complexe que ce qui se trouve sur Itunes, et que les objectifs de notre dispositif informationnel sont plus diversifiés (et donc complexes) que ceux d’Itunes (vendre uniquement). Il était aussi réjouissant d’entendre par un « jeune » que les propositions de découvertes sur un site comme Itunes (leur fameux algorithme) sont vite épuisées, épuisantes, tournent en rond, air vicié. La parade, ça reste la Médiathèque, si elle bouge (mais déjà, notre site communautaire, Mediavores, élargit le principe de suggestions gérées informatiquement par affinités supposées). Enfin, difficile de résumer et de citer tout ce qui a nourri cette conversation de deux heures, à bâtons rompus, passionnante et passionnée, je retiens surtout qu’elle donne du sens à nos efforts, que ça motive de rencontrer ainsi « les gens » !! La jauge de 13, 15 personnes est idéale pour ce type de conversation, il faut certainement les multiplier… (PH) Découvrir notre site communautaire Mediavores – Découvrir le blog du personnel du P44 –